Ulcère gastrique cheval : comprendre et prévenir

Ulcère gastrique cheval : comprendre et prévenir

L'essentiel à retenir : 

Jusqu'à 90 % des chevaux de sport développent des ulcères gastriques. La prévention repose sur une alimentation riche en fibres, des pauses de foin avant l'effort et un suivi vétérinaire. Ces mesures limitent les récidives et préservent le bien-être global du cheval.

Un changement d'appétit, une baisse de performance ou un comportement irritable chez votre cheval : et si vous pensiez à un ulcère cheval ? Fréquents chez les chevaux de sport comme les montures de loisir, ces lésions muqueuses passent souvent inaperçues mais peuvent être gérées grâce à une approche équilibrée entre soins vétérinaires et adaptations quotidiennes. Découvrez comment identifier les signes précoces, comprendre les mécanismes en jeu et agir en prévention pour préserver la santé digestive de votre compagnon équin, en associant alimentation équilibrée et suivi médical personnalisé.

  1. Comprendre l'ulcère gastrique du cheval : une pathologie fréquente mais complexe
  2. L'estomac du cheval : une anatomie à l'origine du problème
  3. Les principales causes et facteurs de risque de l'ulcère chez le cheval
  4. Reconnaître les symptômes : quand faut-il s'alerter ?
  5. Le diagnostic vétérinaire : la gastroscopie, l'examen de référence
  6. Solutions : traitement médical et gestion au quotidien
  7. La prévention : la meilleure stratégie contre l'ulcère du cheval
  8. Ce qu’il faut retenir

Comprendre l'ulcère gastrique du cheval : une pathologie fréquente mais complexe

L'ulcère gastrique équin est une lésion de la muqueuse de l'estomac, comparable à une "plaie" chronique causée par un déséquilibre entre la production d'acide chlorhydrique (HCl) et la protection naturelle assurée par le mucus et les aliments. Heureusement, ce n'est pas une fatalité.

Cet article décortique les mécanismes sous-jacents, explique pourquoi le stress, l'alimentation et le mode de vie jouent un rôle clé, et propose des solutions concrètes pour prévenir ces lésions. Faisons le point sur les causes, les signes à surveiller, les outils de diagnostic et les stratégies de gestion au quotidien.

La santé digestive et la prévention sont des concepts clés pour comprendre cette pathologie. Dans les lignes suivantes, vous découvrirez comment l'acidité excessive endommage la paroi gastrique, pourquoi les chevaux de sport sont particulièrement vulnérables, et comment adapter leur environnement pour réduire les risques.

L'estomac du cheval : une anatomie à l'origine du problème

L'estomac du cheval, organe de petite taille (8 à 15 litres), produit de l'acide chlorhydrique en continu, qu'il y ait ingestion d'aliments ou non. La salive, seule source de bicarbonates neutralisant l'acide, n'est sécrétée que pendant la mastication. Un cheval qui broute 16h/jour bénéficie ainsi d'une meilleure régulation acide que lors de rations concentrées.

L'organe se divise en deux zones : la muqueuse squameuse (non-glandulaire), située en partie supérieure, manque de protection naturelle contre l'acide. La muqueuse glandulaire, en bas de l'estomac, produit à la fois l'acide digestif et des éléments protecteurs (mucus, bicarbonates). Entre ces zones, la margo plicatus marque une frontière nette. La salive, riche en bicarbonates, constitue la première défense.

La différence entre ulcères squameux (ESGD) et glandulaires (EGGD)

Les ulcères gastriques équins (EGUS) regroupent deux pathologies distinctes nécessitant des approches différentes. Sans diagnostic vétérinaire précis, les traitements peuvent être inadaptés.

Caractéristique

Ulcères squameux (ESGD)

Ulcères glandulaires (EGGD)

Localisation

Muqueuse squameuse (partie supérieure)

Muqueuse glandulaire (partie inférieure)

Cause principale

Projection d'acide (exercice, estomac vide)

Défaillance des mécanismes de protection

Facteurs de risque majeurs

Exercice intense, alimentation pauvre en fibres, jeûne

Stress chronique, prise d'AINS, certaines pathologies

Aspect à la gastroscopie

Lésions de type érosion, souvent étendues

Lésions plus variées, parfois en relief ou hémorragiques

 Chez les chevaux de sport, les ulcères glandulaires stricts sont plus fréquents sous contraintes intenses. 

Les principales causes et facteurs de risque de l'ulcère chez le cheval

L’ulcère gastrique du cheval résulte fréquemment d’un déséquilibre entre la production d’acide chlorhydrique et les mécanismes de protection naturelle de la muqueuse. Plusieurs facteurs interviennent, souvent en synergie, expliquant la fréquence élevée de cette pathologie.

L'alimentation : un rôle central dans l'acidité gastrique

Une ration trop riche en céréales ou concentrés (amidon et sucres) augmente la production d’acide gastrique. L’amidon non digéré dans le petit intestin fermente en estomac, générant des acides gras délétères pour la muqueuse squameuse. Les chevaux recevant plus de 100 g d’amidon pour 100 kg de poids vif par repas voient leur risque d’ulcères multiplié par 2,6, atteignant 3,5 fois avec des doses supérieures à 200 g.

Bon à savoir : Le foin stimule la salivation, dont les sels alcalins tamponnent l’acidité. En dessous de 2 % du poids corporel en fourrage quotidien, la muqueuse est vulnérable.

Le stress et le mode de vie : un cercle vicieux

Le stress lié au confinement, aux transports ou aux changements d’environnement active la production de cortisol. Cette hormone altère la sécrétion de mucus protecteur et ralentit la vidange gastrique, prolongeant l’exposition des tissus à l’acide. Les chevaux sportifs ou anxieux sont particulièrement touchés, avec des conséquences comme la perte de masse musculaire ou une baisse de performance.

Attention : Un stress chronique peut aggraver les lésions existantes, alimentant un cycle douloureux et d’irritabilité.

L'exercice intense : un mécanisme physique aggravant

Lors d’efforts intenses, les mouvements musculaires projettent l’acide gastrique sur la muqueuse non protégée (phénomène de « splash acide »).

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) : un risque sous-estimé

Les AINS (phénylbutazone, flunixine) inhibent les enzymes COX-1, réduisant la production de mucus protecteur. Les formules sélectives (firocoxib) limitent cet effet, mais leur usage prolongé reste à risque. Ces médicaments fragilisent principalement la muqueuse glandulaire, aggravant les lésions existantes.

Récap’ : Pour prévenir les ulcères, privilégiez un fractionnement des repas, un accès au pré, un entraînement progressif et un recours mesuré aux AINS sous avis vétérinaire.

Reconnaître les symptômes : quand faut-il s'alerter ?

Les ulcères gastriques ou intestinaux chez le cheval sont fréquents mais souvent silencieux. Les équidés, en tant qu'animaux proies, ont un instinct de survie qui les pousse à dissimuler la douleur. Cette discrétion rend l'observation attentive de leur comportement et de leur état physique essentielle pour une détection précoce.

Les signes d'alerte les plus courants

  • Baisse d'appétit ou alimentation capricieuse (ralentissement en mangeant, tri des aliments, préférence soudaine pour certains fourrages)
  • Amaigrissement progressif ou difficulté à prendre du poids, malgré une ration adaptée
  • Poil terne, rêche ou piqué, traduisant un métabolisme déséquilibré
  • Changements de comportement (irritabilité, anxiété, apathie ou agressivité envers les congénères)
  • Bâillements fréquents, surtout pendant les repas, grincements de dents (bruxisme) ou position de flairage prolongée (flehmen) en lien avec un inconfort digestif
  • Coliques répétées, souvent légères après les repas, ou crottins mous sans cause évidente
  • Réduction de performance : raideur dans les allures, résistance à s'incurver, difficulté à engager les postérieurs ou à maintenir un trot actif
  • Sensibilité au sanglage ou réaction de défense au pansage du ventre (oreilles en arrière, coups de queue, menaces de morsure)

Baisse de performance et impact sur la locomotion

La douleur gastrique ou intestinale provoque des contractures dorsales (dorsalgie) et une posture antalgique. Le cheval évite d'utiliser correctement son dos, ce qui se traduit par une raideur dans les allures, une difficulté à s'incurver ou à étendre le train arrière. Ces signes s'accompagnent parfois d'une sensibilité accrue aux flancs ou d'une tendance à s'allonger plus souvent. Chez les sportifs, cette gêne se manifeste par une réticence à se rassembler, à allonger l'allure ou à maintenir un travail collecté, ce qui peut être confondu avec un problème musculaire ou articulaire.

Attention : Une crise de colique aiguë (roulage, sueur abondante, immobilité) constitue une urgence vétérinaire immédiate. Ne jamais reporter la consultation.

Ces signes, même légers, nécessitent une consultation rapide. La gastroscopie est incontournable pour diagnostiquer les ulcères gastriques, tandis que l'échographie transabdominale est nécessaire pour les lésions intestinales. Sans suivi, les complications graves (hémorragie, perforation) ou les rechutes sont fréquentes, surtout si le stress ou l'alimentation inadaptée persistent. Un diagnostic rapide accélère la guérison, souvent sur 2 à 3 mois, et limite les retentissements sur la santé globale du cheval.

Le diagnostic vétérinaire : la gastroscopie, l'examen de référence

Seul un vétérinaire peut confirmer un ulcère gastrique chez le cheval. Les signes cliniques (baisse de forme, coliques légères, manque d'appétit) ne sont pas spécifiques, rendant l'auto-diagnostic risqué.

La gastroscopie est l'examen clé. Elle consiste à insérer un endoscope de 3 mètres sous sédation légère, après un jeûne de 12 heures. Un vétérinaire spécialisé observe directement l'état de la muqueuse stomacale.

Cet examen permet :

  1. De confirmer la présence d'ulcères.
  2. D'identifier leur type : ESGD (muqueuse squameuse) ou EGGD (muqueuse glandulaire).
  3. D'évaluer leur sévérité via un système de grading de 0 à 4 pour l'ESGD.

La précision du diagnostic est cruciale : un traitement inadapté ou inutile expose le cheval à des risques et coûts inutiles 

Les analyses sanguines ne permettent pas de poser un diagnostic fiable. Seule la visualisation directe de l'estomac via gastroscopie garantit une prise en charge adaptée. Cet examen indolore dure 10 à 20 minutes et nécessite un jeûne strict pour une exploration complète.

Après l'examen, le cheval reste à jeun 2 heures pour éviter tout risque d'inhalation pulmonaire. La gastroscopie reste la méthode la plus précise pour distinguer les deux types d'ulcères, dont les mécanismes physiopathologiques diffèrent : l'ESGD lié à l'exposition à l'acide gastrique, et l'EGGD lié à une défaillance des défenses naturelles de la muqueuse.

Solutions : traitement médical et gestion au quotidien

Le traitement médicamenteux

Le traitement des ulcères gastriques chez le cheval doit impérativement être réalisé sous surveillance vétérinaire. L’oméprazole est le traitement de référence, agissant comme inhibiteur de la pompe à protons (IPP). Il réduit l’acidité en bloquant les enzymes productrices d’acide, permettant à la muqueuse de se réparer. Disponible sous forme de pâte orale (ex. PepTicure), il est le seul autorisé en France. Posologie : 4 mg/kg pendant 4 semaines, puis 2 mg/kg pour éviter le rebond acide.

Le sucralfate complète souvent le traitement. En réagissant avec l’acide gastrique, il forme un gel protecteur sur les lésions. Utilisé pour les ulcères glandulaires à raison de 20 mg/kg toutes les 12 heures, il s’administre avec l’oméprazole, surtout chez les poulains et chevaux sportifs.

Soutien de la muqueuse : l'option "pansement" en complément des soins

Certaines situations exigent un coup de pouce local pour protéger la paroi gastrique, notamment chez les cheveaux sensibles, en reprise de travail ou lors de déplacements. Un pansement gastrique pour cheval, agit comme une barrière temporaire au contact de l'acidité, participant au confort digestif tout en accompagnant les bonnes pratiques. 

Mode d'emploi du pansement gastrique 

  • Timing : donner avant l'exercice, un transport ou un événement stressant ; et/ou selon le protocole recommandé par le vétérinaire
  • Avec l'alimentation : proposer une poignée de luzerne/foin 15-20 min avant le travail pour créer un "matelas fibreux" puis administrer le pansement.
  • Surveillance : suivre l'appétit, la qualité des crottins, le confort au sanglage et la performance ; adapter la durée d'utilisation avec un vétérinaire.

L’adaptation de l'alimentation et du mode de vie

Les mesures alimentaires et environnementales sont essentielles pour éviter les récidives. Voici les bonnes pratiques clés :

  • Optez pour le foin : Privilégiez un foin riche en fibres (1,5-2 % du poids corporel/jour), évitant les périodes d’estomac vide >4h. La luzerne, riche en calcium, agit comme tampon naturel.
  • Réduire les céréales : Limitez les concentrés (max 1 g d’amidon/kg/repas). Privilégiez les matières grasses (huiles végétales) pour éviter la fermentation.
  • Fréquence des repas : Fractionnez les rations en plusieurs petits repas/jour pour favoriser la salivation et ralentir le transit.
  • Hydratation : Assurez l’accès à de l’eau fraîche en permanence. Un peu de sel stimule la boisson.
  • Réduire le stress : Privilégiez le pré et les interactions sociales pour limiter le stress, principal facteur d’ulcération. Évitez les changements brusques d’environnement ou d’horaire.

Point de vigilance sur les électrolytes

Les électrolytes, nécessaires après l’effort, nécessitent une administration prudente. Évitez l’administration pure (pâte ou seringue) pour ne pas irriter l’estomac. Mélangez-les à de l’eau ou une ration humide (ex. mash).

Bon à savoir : Donner une poignée de foin ou de luzerne 20 minutes avant l’exercice stimule la salive et crée un matelas fibreux, limitant l’acidité gastrique.

La prévention : la meilleure stratégie contre l'ulcère du cheval

Ce phénomène douloureux résulte d’un déséquilibre entre la production d’acide chlorhydrique (jusqu’à 1,5L/heure) et la protection naturelle de la muqueuse. Heureusement, 4 leviers simples réduisent significativement les risques.

Protocole de prévention en 4 points

  • Alimentation basée sur les fibres : Le foin à volonté (1,5 à 2% du poids du cheval) tamponne l’acide gastrique. Privilégiez la luzerne pour son effet protecteur (protéines et calcium). Les céréales, sources d’acidité, doivent être limitées à moins de 5 livres par repas.
  • Mode de vie adapté : Un estomac vide plus de 3-4 heures double le risque. Offrez 12 à 14 heures quotidiennes de pâturage ou de paddock avec congénères. Les filets à foin à petites mailles prolongent la mastication (source de salive tampon).
  • Gestion du travail : Un exercice intense à jeun multiplie par 2 les éclaboussures acides. Donnez 1 heure avant l’effort une petite ration de foin, surtout en compétition. Évitez les entraînements quotidiens longs (privilégiez 1 à 4 séances/semaine).
  • Suivi et vigilance : Les signes subtils (perte d’appétit, sensibilité au sanglage, baisse de performance) méritent une consultation. Un cheval sur 2 peut être atteint sans symptômes visibles. Une gastroscopie permet un diagnostic précis.

Ces pratiques ne préviennent pas seulement les ulcères : elles améliorent aussi le bien-être global, la récupération post-effort et la santé intestinale via des fibres agissant comme prébiotiques. Pour les sportifs, une alimentation riche en oméga-3 (huile de lin) et une réduction du stress environnemental sont des alliés précieux. En cas de traitement aux AINS (anti-inflammatoires), un suivi vétérinaire est indispensable pour éviter l’aggravation des lésions.

Ce qu’il faut retenir

En résumé, voici les 5 mesures clés pour protéger votre cheval des ulcères gastriques :

  • Privilégier le foin à volonté : les fibres du foin ralentissent la digestion et réduisent les pics d’acidité, surtout avec du foin de luzerne pour son effet protecteur grâce au calcium et aux protéines.
  • Minimiser le stress : privilégier un environnement stable (sorties régulières au pré, contacts sociaux), éviter les changements brutaux (isolement, transport) et modérer l’exercice pour limiter le cortisol, facteur d’acidité.
  • Savoir repérer les signes discrets : appétit capricieux, baisse de performance, coliques légères ou comportements inhabituels (bruxisme, sensibilité au sanglage) nécessitent une consultation immédiate.
  • Confirmer le diagnostic par gastroscopie : seule méthode fiable pour visualiser les ulcères et guider le traitement. Examen rapide sous sédation, essentiel pour écarter d’autres causes.
  • Prévenir les récidives : adapter l’alimentation (luzerne, huiles végétales, limites des céréales), éviter l’exercice à jeun, utiliser des compléments (pectine, argile) sous avis vétérinaire, et réduire l’usage prolongé des AINS.

 

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